Pour réussir une transformation réelle, le développement durable nécessite l’intégration de pratiques durables dans chaque département et ne peut pas se limiter à des initiatives isolées.
En résumé :
- Pour parvenir à une transformation durable, les entreprises doivent intégrer le développement durable dans chaque département, en passant d’initiatives isolées à une action globale à l’échelle de l’organisation.
- La collecte et l’analyse de données sont certes essentielles, mais les entreprises doivent accorder la priorité à la mise en œuvre des plans de développement durable plutôt qu’à l’élaboration constante d’analyses de rentabilité.
- Les entreprises doivent s’impliquer dans la planification de scénarios afin d’anticiper les futures pressions environnementales et sociales, ce qui leur permettra de s’adapter et de prospérer quel que soit le contexte à l’avenir.
- L’intégration du développement durable dans la stratégie globale de l’entreprise suppose non seulement de le prendre en compte dans les discussions d’entreprise mais aussi de réorienter les objectifs généraux de l’entreprise vers des résultats porteurs de changements durables.
- Les entreprises doivent reconnaître que les risques financiers liés à l’inaction sont plus graves et comprendre la nécessité de changements systémiques et porteurs de transformation afin de relever les défis environnementaux actuels.
Société d’alimentation XYZ : Une étude de cas (fictive mais plausible) La société d’alimentation XYZ, entreprise à l’origine du produit phare CandyCakes, ne voyait que des progrès minimes dans ses efforts pour promouvoir le développement durable, alors même qu’elle avait constitué l’une des équipes les plus importantes et les plus spécialisées de l’industrie dans ce domaine. Lors d’une conférence téléphonique avec les actionnaires au cours du dernier trimestre, le PDG Humphry Garland a laissé entendre que l’obligation d’information mettait en évidence des problèmes dans les activités de l’entreprise et en a attribué la responsabilité à certains fournisseurs pour leur manque de coopération. Suite à des réactions négatives, Judy Gable, directrice des opérations, a retiré cette déclaration dans un communiqué de presse. Clint Davis, le directeur général du marketing, était très inquiet à juste titre, car XYZ avait déjà par le passé essuyé des critiques au regard de ses efforts en matière de développement durable, et il ne voulait pas voir l’entreprise accusée une nouvelle fois de ne pas prendre au sérieux les exigences de ses consommateurs. La direction a reconnu que la marque et son acceptabilité sociale étaient en jeu. Cependant, l’absence de progrès a rendu tout investissement supplémentaire improbable tant que des activités de diagnostic n’auraient pas été menées pour répondre à une question fondamentale : pourquoi ne nous transformons-nous pas ? Arrêtons-nous sur l’histoire de la société d’alimentation XYZ et fournissons un peu de contexte…
Malgré une prise de conscience toujours plus importante et des investissements croissants dans le domaine du développement durable, de nombreuses entreprises se trouvent encore dans l’incapacité d’opérer un réel renouvellement pour faire face à la crise environnementale mondiale. Alors que le monde est aux prises avec les effets tangibles de l’urgence climatique et de la disparition de la nature, les entreprises sont soumises à une pression croissante, non seulement pour s’engager en faveur du développement durable, mais aussi pour démontrer des progrès réels et mesurables. Les enjeux n’ont jamais été aussi importants et il convient d’agir maintenant pour éviter des conséquences irréversibles. Le Rapport de synthèse 2023 du premier bilan mondial de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), qui évalue la situation mondiale en matière de changement climatique, dépeint une réalité bien sinistre. Il a montré que les émissions mondiales de gaz à effet de serre ne sont pas conformes aux stratégies d’atténuation qui avaient été modélisées afin atteindre l’objectif de 1,5 °C et il a chargé les entreprises et les institutions financières d’accélérer la transformation de leurs systèmes pour s’aligner sur l’Accord de Paris. La plupart des PDG ne seraient pas surpris par cette évaluation, ils ont déjà connaissance de la situation. Au cours des dix dernières années, les investissements des entreprises et l’intérêt des dirigeants pour le développement durable ont considérablement augmenté. Et même si la reconnaissance de la nécessité de progresser représente déjà une amélioration, cela ne suffit pas à faire avancer les choses. Entre-temps, le débit constant de mauvaises nouvelles concernant l’état de notre planète menace toujours plus de se transformer en déluge. Si le seuil de 1,5°C est privilégié par les entreprises et les médias, il ne représente que la partie émergée de l’iceberg dégoulinant. La nature est en difficulté. L’accès à une eau propre et abondante, la santé des sols, la qualité de l’air et la biodiversité de notre planète sont en péril. Ces facteurs font déjà des ravages au sein des communautés, des ressources naturelles et des entreprises elles-mêmes. Pourtant, aussi tangible que soit la crise environnementale, les entreprises ne sont tout simplement pas en train de se transformer à la vitesse et à l’échelle nécessaires pour atteindre leurs objectifs en matière de développement durable. Elles peinent à s’aventurer au delà d’ajustements progressifs à la situation actuelle. Mais ce n’est pas en continuant à faire la même chose que les dirigeants parviendront à relever les défis auxquels sont confrontées les entreprises et l’humanité dans son ensemble. Pour assurer la stabilité de la planète, il faut des solutions porteuses de réelles transformations, de l’innovation et une remise en cause en profondeur de la façon dont sont couramment menées les activités économiques. Bien sûr, il est plus facile de parler de transformation que de la concrétiser. Il s’agit d’une tâche complexe et monumentale : pour progresser, les entreprises ont besoin d’une connaissance précise des défis à relever et d’une stratégie pour les surmonter.
S’y retrouver jungle des données
Les entreprises continuent de consacrer du temps, de l’énergie et des ressources à la mise en place d’équipes chargées de contrôler, de mesurer et de gérer leur impact en matière de développement durable. Nombre d’entre elles ont établi des bases de référence, collecté des données, mesuré leur empreinte et fixé des objectifs appropriés de réduction des émissions de carbone. Près de 5511 entreprises (selon le dernier décompte) sont même allées au-delà de ces efforts en alignant leurs objectifs sur les meilleures données scientifiques disponibles. Évidemment, cet investissement est nécessaire car un problème ne peut être résolu s’il n’est pas d’abord identifié et compris. Les mesures revêtent une importance fondamentale et les solutions numériques sont extrêmement prometteuses pour aider à mener ces activités avec plus de précision et d’efficacité. Cependant, trop souvent, les équipes chargées du développement durable se retrouvent coincées dans un cycle d’analyse sans fin. Les équipes chargées du développement durable se contentent souvent de peaufiner éternellement le dossier de viabilité commerciale plutôt que d’autoriser des actions concrètes à court terme. Si un suivi, une évaluation et une mesure efficaces sont des éléments essentiels pour soutenir la prise de décision et l’établissement de priorités, l’accumulation sans fin de chiffres ne permet pas toujours d’obtenir de meilleures informations et ne constitue en aucun cas un indicateur des progrès réalisés en matière de développement durable. Après tout, même les meilleures données du monde ne conduiront pas à un changement réel si elles se sont pas utilisées pour passer à l’action.
L’analyse continue des données n’aboutira pas à un changement si les informations obtenues n’aboutissent pas à des actions concrètes.
Les entreprises ne doivent pas se contenter d’investir dans la collecte et l’analyse de données. Les ressources doivent être affectées non seulement à l’élaboration de plans, mais aussi à leur mise en œuvre. Si le coût initial est plus élevé aujourd’hui, les risques financiers dee l’inaction sont encore plus importants. Pour avoir une chance d’éviter les conséquences les plus graves de la crise climatique et de l’effondrement des écosystèmes, des industries entières, de l’alimentation à la logistique en passant par la mode et la construction, doivent se réinventer. Prenons l’exemple de la fabrication de systèmes de transmission. Nous savons depuis longtemps que les système de motorisation électriques représentent l’avenir de l’industrie mais leur adoption demeure lente. Il ne fait aucun doute que les fabricants conventionnels ont de gros obstacles à franchir. Ils doivent réoutiller leurs usines, former à nouveau leur main-d’œuvre et modifier leurs chaînes d’approvisionnement. Mais ils doivent également faire pression pour développer les infrastructures de recharge ou pour pouvoir s’approvisionner plus facilement en carburants alternatifs, le tout sur des réseaux plus propres. Ils doivent utiliser tout leur pouvoir d’innovation pour rendre ces moteurs électriques aussi bons (si ce n’est meilleurs) que les systèmes de transmission traditionnels afin d’éliminer toutes les raisons de ne pas les acheter. Et ils doivent entraîner leur clientèle dans cette transition.
Maîtriser la planification de scénarios pour envisager un avenir différent
Traditionnellement, les entreprises utilisent des données historiques pour résoudre des problèmes et justifier leur planification. Mais le contexte dans lequel elles élaborent leurs projets a profondément changé. Les pressions environnementales et sociales engendrées par l’augmentation de la température mondiale, des réglementations plus strictes et des marchés en mutation signifient que les conditions seront très différentes à l’avenir que par le passé. Toute erreur de planification et de prise de décision commise aujourd’hui, couplée aux conditions économiques, politiques, technologiques et de marché susmentionnées, risque d’avoir des conséquences dévastatrices pour une entreprise. Il suffit de regarder les constructeurs qui ont mis du temps à se lancer dans production de véhicules électriques pour comprendre qu’il est impératif pour les entreprises d’anticiper ce qui se profile à l’horizon et de se préparer à agir le plus tôt possible. Nous ne pouvons pas prévenir les catastrophes de demain sans les voir venir aujourd’hui. Les entreprises qui ont la vision d’un avenir différent jouissent aussi d’une meilleure capacité à prévoir et à influencer l’avenir, et à s’adapter si nécessaire. Pour acquérir cette capacité de prévision stratégique, les dirigeants d’entreprise ont besoin d’analyses plus prospectives, non seulement de leurs propres opérations, mais aussi en amont, afin de comprendre réellement les impacts et les risques environnementaux tout au long de leur chaîne de valeur. La planification de scénarios peut donner lieu à des révélations au sein de la direction et servir de catalyseur pour amorcer un véritable changement. Elle permet aux entreprises d’éliminer une partie de l’incertitude de l’avenir en explorant des scénarios futurs plausibles, pas nécessairement pour prédire ce qui se passera, mais pour déterminer comment l’entreprise peut réagir et gérer toutes sortes de réalités potentielles. Il existe de nombreux scénarios possibles quant à l’impact qu’aura la crise climatique sur notre planète au cours des prochaines décennies. Le scénario du pire comporte des risques physiques plus élevés. Les entreprises devront donc comprendre, par exemple, dans quelle mesure l’augmentation des tempêtes, des épisodes de sécheresse, des inondations et des vagues de chaleur risque de perturber les chaînes d’approvisionnement. De même, si une économie à faibles émissions de carbone venait à se matérialiser rapidement (avec des réglementations plus lourdes liées au carbone et des coûts accrus), les entreprises devront alors explorer leurs vulnérabilités et comprendre jusqu’à quel point elles peuvent s’adapter. La planification de scénarios peut aussi s’accompagner de tests. Ainsi, plutôt que d’élaborer leurs propres scénarios, les entreprises appliquent des scénarios élaborés par d’autres (tels que des organismes sectoriels) afin de tester les risques que ces scénarios représentent pour leur entreprise et de déterminer si elles sont capables de résister et persister dans le cadre de chaque hypothèse.
Sortir le développement durable de son isolement et œuvrer pour un but commun
Dans l’émission à succès Koh-Lanta, les candidats sont d’abord répartis en équipes et s’affrontent dans des épreuves. Au fur et à mesure que le jeu progresse, les équipes fusionnent jusqu’à n’en former plus qu’une seule, ce qui donne lieu à un jeu individuel où les alliances changent et où les candidats doivent s’adapter à de nouvelles dynamiques pour devancer la concurrence et remporter le prix ultime. Ce processus n’est pas sans rappeler la façon dont les entreprises abordent la question du développement durable. Le développement durable est généralement considéré comme une entité à part entière. Comme tout département, il a une sphère d’influence limitée ; il doit rivaliser pour obtenir des ressources, mener des analyses de rentabilité et convaincre les autres départements d’appliquer ses conseils et d’y donner suite. Un facteur clé dans les considérations moins évidentes de la culture d’entreprise est le fonctionnement habituel de celle-ci. La façon dont une entreprise est organisée détermine les pratiques subséquentes qui permettent aux professionnels de travailler et d’exercer leurs fonctions. Si vos tâches consistent à mettre en œuvre des changements et à promouvoir de bonnes pratiques dans l’ensemble des opérations, vous avez besoin non seulement d’un niveau d’autorité adéquat, mais aussi de proximité et d’accès à celles-ci. La plupart des équipes chargées du développement durable ne sont pas dotées de tels avantages. Elles ne peuvent pas non plus tirer parti des alternatives opérationnelles habituelles. Par exemple, les départements chargés du développement durable auraient bien du mal à mettre en place des contrôles internes pour garantir le développement durable de la manière dont le marketing est habilité à examiner toute communication de masse quittant l’entreprise ou dont la comptabilité a le pouvoir d’exiger des autorisations pour certains niveaux de dépenses. « Rendre durable » n’est pas une simple étape dans le flux des processus. La transformation durable d’une organisation ne nécessite pas seulement d’amorcer un changement à travers les fonctions. La conception et la mise en œuvre des actions pour y parvenir sont aussi complexes que l’entreprise et ses opérations elles-mêmes. Compte tenu du diagnostic et de la stratégie d’action nécessaires pour améliorer les opérations, il est peut-être temps d’envisager d’intégrer des spécialistes du développement durable dans les différentes fonctions et sous-fonctions de l’organisation. En leur octroyant cette proximité et cet accès, la transformation peut être activement enclenchée de l’intérieur, plutôt que passivement influencée de l’extérieur.
Calculer le coût de l’inaction et pas seulement celui de l’action
Comprendre (et évaluer) le coût de l’inaction par rapport au coût de l’action est un autre changement crucial qui permettra de réaliser la transformation, ou du moins de relancer l’action là où elle stagne. Trop souvent, les entreprises manquent de confiance pour entamer un changement parce qu’elles se concentrent encore sur le coût associé à l’action plutôt que sur le prix de l’inaction. Il est temps pour les entreprises de se poser les bonnes questions : quels sont les risques liés au fait de transformer nos gammes de produits qui risquent de ne plus être commercialisées ou de ne plus être conformes à la législation dans un avenir proche ? Comment le prix ou la disponibilité de nos matières premières vont-ils évoluer à l’avenir ? En répondant à ces questions, les entreprises peuvent explorer les changements fondamentaux nécessaires pour transformer leurs activités, en comparant les coûts d’investissement et le coût du maintien du statu quo. Toutefois, pour que cela fonctionne, la promotion du développement durable doit être intégrée à la stratégie commerciale plus large de l’entreprise, non seulement en l’intégrant aux discussions plus générales, mais en réorientant l’ensemble de la conversation en fonction des objectifs généraux de l’entreprise. Les entreprises élaborent souvent des analyses de rentabilité avant de procéder à des changements individuels. Par exemple, elles ont pu identifier une nouvelle source d’emballage pour un produit en particulier, ce qui a permis de réduire les émissions de carbone de 15 %, même si cela a entraîné une légère augmentation des coûts. Il s’agit peut-être là d’une petite victoire pour l’environnement, mais plutôt que de lutter pour des changements progressifs, les entreprises doivent commencer à réfléchir à des changements systémiques qui donnent lieu à des transformations réelles et qui les accélèrent. Si tous les progrès sont positifs, l’ampleur et l’urgence des défis auxquels nous sommes confrontés exigent une action plus vaste et plus audacieuse. En repensant nos systèmes, nos comportements et nos priorités pour créer un monde plus équitable, plus résilient et plus régénérateur, les entreprises doivent comprendre et accepter qu’elles ne pourront pas satisfaire tout le monde. La période de transition impliquera peut-être des sacrifices à court terme pour permettre un avenir pérenne. Mais ce n’est que par la transformation que nous pouvons espérer relever les défis du développement durable de manière globale et efficace.
Voyons maintenant les progrès réalisés par la société d’alimentation XYZ… Même si la société d’alimentation XYZ a encore un long chemin à parcourir dans sa transformation, elle a pris des mesures importantes et peut enfin faire état de progrès réels. Dans les domaines où l’entreprisen’a pas atteintses objectifs, des explications substantielles et précises ont été apportées. Ces progrès ne se sont pas produits du jour au lendemain ; ils ont nécessité d’importants changements dans les processus de l’entreprise. D’abord, elle a numérisé et publié ses données en matière d’empreinte carbone en les mettant à la disposition de tous les départements afin qu’ils puissent mesurer leur impact sur le climat et la nature. Cela a permis de créer un tableau de bord en temps réel pour observer l’impact de chaque étape de son travail. Ensuite, l’entreprise a donné la priorité à quelques projets clés afin de concentrer les efforts et de démontrer des progrès mesurables. Celaa également permis de responsabiliser l’ensemble de l’organisation en associant le programme du développement durable à celui de l’entreprise. Avec quelques victoires à son actif, tout le personnel a commencé à travailler vers un but commun et à progresser rapidement. Aujourd’hui, la société d’alimentation XYZ ne dispose plus seulement d’une équipe ou d’une fonction autonome chargée du développement durable mais a réussi à intégrer le développement durable dans l’ensemble de l’organisation afin de garantir une transformation à l’échelle de l’entreprise.
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